Visite dégustation avec Jérôme Landais, propriétaire et unique ouvrier du Domaine de Mauriet. Jérôme met en avant sa reconversion professionnelle plus que réussie, son bel engagement en faveur de l’agriculture bio et ses méthodes personnelles mais pertinentes de vinification et d’élevage de ses vins. Une dégustation de ses deux cuvées, Tradition et La Gravette, permet de bien mettre en valeur l’identité originale de ce Pessac-Léognan prometteur.
LE DOMAINE DE MAURIET EST LE MOINS ETENDU DE L’AOC
Le Domaine de Mauriet s’étend sur 1,4 hectare
Le Domaine de Mauriet représente la plus petite surface vinicole de l’appellation Pessac-Léognan. S’étendant sur 1,4 hectare, le Domaine de Mauriet se compose de deux parcelles : la parcelle historique de 0,4 hectare et la seconde parcelle d’un hectare en face de la ville de Léognan.
L’arrière-arrière-grand-père de Jérôme cultivait déjà la vigne
La parcelle historique appartenait à l’arrière-arrière-grand-père de Jérôme, qui était vigneron mais aussi maréchal-ferrant et maraicher. A cette époque, il échangeait ses barriques de vin contre des services avec ses voisins. Mais l’arrière-grand-mère de Jérôme n’a pas poursuivi l’activité de son père et la parcelle est tombée en friche.
Le Domaine de Mauriet tire son nom de l’ancêtre de Jérôme
Mauriet étant le nom de famille de son arrière-arrière-grand-père, Jérôme le fait sien naturellement pour baptiser son domaine. Et le Domaine de Mauriet se situant Chemin Le Pape à Léognan, le premier millésime de Jérôme porte le nom de cuvée Le Pape.
Mais, pouvant entraîner une certaine confusion avec le Château Le Pape, Jérôme change le nom de sa cuvée, qui porte désormais le nom de Tradition. L’autre cuvée se prénomme La Gravette.
Le Domaine de Mauriet produit uniquement des vins rouges
La parcelle historique se compose de 70% de cabernet sauvignon et de 30% de merlot. Jérôme a finement adapté l’implantation de ses cépages au profil pédologique, notamment autour de la veine de sable traversant la parcelle.
A petit domaine, petite production
Pour son premier millésime en 2019, Jérôme produit une barrique de vin. En 2022, Jérôme obtient un rendement intéressant de 27 hectolitres à l’hectare. Aussi la production annuelle du Domaine de Mauriet oscille aujourd’hui entre 6000 et 8000 bouteilles.
Jérôme vend uniquement son vin au Domaine de Mauriet. Il fait la promotion de ses vins à l’occasion des journées portes ouvertes de Pessac-Léognan en juin et décembre. Mais ses copains sont bien sûr ses plus fidèles clients !
Jérôme privilégie le cabernet sauvignon
Jérôme estime que le merlot, cépage précoce, sensible au mildiou et donnant des degrés d’alcool de plus en plus élevés, est de moins en moins adapté au terroir bordelais. D’ailleurs, au sein de l’AOC Pessac-Léognan, le merlot a tendance à disparaître au profit du carménère, du malbec ou du petit verdot.
Par ailleurs, le cabernet sauvignon, dont la sous-maturité était autrefois compensée par le merlot, atteint aujourd’hui des maturités parfaites. Le cabernet sauvignon se suffisant donc maintenant à lui-même, Jérôme préfère optimiser encore son travail que de le diluer dans des assemblages.
D’AVOCAT A VIGNERON
La viticulture est une passion pour Jérôme
Ayant initialement embrassé une carrière d’avocat à Bordeaux, Jérôme, à l’automne 2016, commence à replanter des vignes par passion sur la parcelle familiale. Aussi il crée une SCEA pour encadrer cette activité de loisir.
Jérôme produit son premier Domaine de Mauriet en 2019
Jérôme fait l’acquisition d’une parcelle complémentaire auprès de l’un de ses voisins. Sur cette parcelle, figure un garage que Jérôme compte bien exploiter. En effet, il y réalise ses deux premiers millésimes, en 2019 et 2020 !
Jérôme change d’orientation professionnelle en 2021
A la fin de l’année 2019, Jérôme fait l’acquisition d’un hectare supplémentaire situé en face de Léognan. Puis, estimant avoir fait le tour de son métier d’avocat au bout de dix ans et ne pouvant mener de front ses deux activités, il s’installe en tant que jeune agriculteur au 1er janvier 2021.
Jérôme est un autodidacte polyvalent
Avec deux de ses copains, Jérôme érige lui-même son chai, grâce à un kit d’installation acheté en Espagne. Son chai est conçu pour pouvoir vinifier jusqu’à 4 à 5 hectares, ce qui constitue le seuil de rentabilité.
De la dalle de béton aux installations intérieures, Jérôme construit tout lui-même. Il a du également tout apprendre : viticulture, vinification, mécanique, soudure…
Cette diversité de compétences plait beaucoup à Jérôme. Par ailleurs, n’ayant pas suivi de formation viticole, il est le plus libre et le plus objectif possible dans son activité bio. Ce qui représente sa plus grande réussite et sa plus grande fierté.
Jérôme est aussi cuisinier. Organisant autour de barriques des repas de groupe sur la terrasse en bois jouxtant le chai, il propose pâtés de sanglier, crevettes et seiches à la plancha, entrecôtes au sarment, magrets fumés, camemberts à la braise ou encore mousses au chocolat.
Jérôme a bénéficié des conseils de la jeune génération de l’AOC
Ayant appris de ses erreurs lors de ses essais, Jérôme a pu surtout échanger avec ses nombreuses connaissances travaillant dans le domaine du vin, notamment au sein de l’appellation Pessac-Léognan.
Vincent Plantade, propriétaire du Château Haut-Plantade, Gabriel Vialard, directeur technique du Château Haut-Bailly, Freddy Flé, chef de culture du Château Carbonnieux, Sean Matthys-Ménard, ancien gérant du Château Baulos Charme, Benoît Prévoteau, chef de culture du Château Malartic-Lagravière, Paul Garcin, directeur général du Château Haut-Bergey ou encore Julien Miailhe, cogérant du Château Carrosse Martillac, représentent la génération montante de l’AOC avec laquelle Jérôme a beaucoup échangé.
Par ailleurs, les directeurs de château, ne considérant pas le Domaine de Mauriet comme un concurrent direct et enviant Jérôme pour sa liberté d’entreprise, ont été très enclins à le conseiller. La petite taille de sa structure lui a permis également d’obtenir la bienveillance des laboratoires et des entreprises de vente de matériel vinicole.
Le Domaine de Mauriet est le plus jeune Pessac-Léognan
Avec le Château Carrosse Martillac, le Domaine de Mauriet est le plus jeune Pessac-Léognan. Depuis la création du syndicat Pessac-Léognan en 1987, ce sont les deux seules nouvelles créations de domaine.
LE DOMAINE DE MAURIET ABRITE QUELQUES LOCATAIRES BIO…
Jérôme se lance dans l’élevage des abeilles
Au début de son activité, Jérôme élève des abeilles, qu’il vend à des producteurs de miel. Il vend ainsi des reines et des essaims, qui se négocient respectivement autour de 25 et 180 euros.
Mais l’hiver dernier, 95% de ses abeilles meurent. En effet l’été précédent très sec ne leur a pas permis de fabriquer suffisamment de nectar. Dans l’attente de reconstituer un cheptel conséquent, Jérôme va donc produite du miel bio : du miel d’acacia et du miel toutes fleurs de printemps et d’été.
Quelques moutons bio peuplent le Domaine de Mauriet
Les moutons de Jérôme lui permettent d’entretenir non seulement ses prairies pâturées, mais surtout ses vignes en hiver. Entre février et mi-mars, les moutons mangent l’herbe au pied des ceps, permettant ainsi à la vigne de pousser de manière optimale.
Par ailleurs, l’herbe favorisant les gelées, les moutons permettent également à la vigne de mieux résister aux périodes de grand froid. Pour lutter contre le froid, Jérôme imagine installer à moyen terme des voiles d’hivernage. A condition que le syndicat de Pessac-Léognan autorise cette pratique.
En outre, Jérôme compte mettre à profit ses agneaux pour sa consommation personnelle ou bien pour les repas qu’il organise.
Jérôme a une vision globale et expérimentale de son exploitation bio
Jérôme a le projet de planter des végétaux que les abeilles butineront et que les moutons mangeront après la floraison.
Par ailleurs, du choix des périodes de plantation au traitement des vignes, en passant par la taille de celles-ci ou la température de vinification, Jérôme fait de nombreux essais tout au long du processus d’élaboration de ses vins. Et avec beaucoup de succès!
LES PROCEDES D’ELABORATION DES VINS SONT ATYPIQUES
La cuvée Tradition est classique de l’appellation Pessac-Léognan
Après les vendanges manuelles familiales, les raisins sont déversés directement dans des barriques brutes ouvertes. Puis Jérôme vinifie dans celles-ci et transvase les jus en cuves inox pour homogénéiser les lots.
Ensuite le vin fait l’objet d’un élevage dans les mêmes barriques, mais qui ont été finalisées entretemps. Ce qui permet de mieux fondre les tannins. A chaque millésime, Jérôme utilise des fûts neufs en chêne français.
La cuvée La Gravette est très atypique
Pour ce monocépage, dont les raisins proviennent de la parcelle d’un hectare, un sixième de la production suit le procédé appliqué pour la cuvée Tradition. Par ailleurs, quand les rendements sont suffisants, Jérôme vinifie ses deux cuvées séparément.
Après les vendanges, les raisins passent des cagettes à l’érafloir. Puis les raisins sont triés grâce à une table de tri vibrante et passent en cuve. Les vendangeurs foulent ensuite les raisins aux pieds à l’ancienne.
Pour ce cabernet sauvignon, Jérôme a sensiblement abaissé la température de fermentation, afin de bien mieux fondre les tannins et davantage faire ressortir le côté fruité. Jérôme a réussi à sublimer le côté fruit du cabernet sauvignon. Comme pour la cuvée Tradition, Jérôme effectue un remontage aéré pour réactiver les levures de vinification et des pigeages.
Seul ouvrier du Domaine de Mauriet, Jérôme fait son vin de A à Z
Jérôme bouche ses bouteilles grâce à une boucheuse à main. Il cire lui-même les cols de ses bouteilles et colle enfin les étiquettes à la main.
LE DOMAINE DE MAURIET DISPOSE DE DEUX BELLES CUVEES
Cuvée La Gravette 2020
D’une belle robe rouge grenat, ce 100% cabernet sauvignon révèle de belles notes de pruneau et de cerise bien mûre. La bouche étonnamment fruitée est fine, fraîche, légère et parfaitement équilibrée.
Pouvant se déguster pendant encore au moins cinq ans, ce Pessac-Léognan rouge sera parfait en apéro ou avec un magret de canard, une entrecôte aux sarments ou bien une côte de boeuf grillée.
Cuvée La Gravette 2022
D’un très beau rouge noir intense, ce Pessac-Léognan rouge offre un nez encore plus fruité que le millésime 2020, mais cette fois centré sur la mûre. La bouche est également plus fruitée, plus ample et plus ronde que le millésime 2020.
Ce cabernet sauvignon encore plus réussi que le millésime 2020 se gardera plus longtemps que La Gravette 2020. Ce Pessac Léognan rouge se déclinera autour des mêmes accords mets vin.
Cuvée Tradition 2022
D’une belle robe rouge vif, le nez de ce Pessac Léognan rouge est particulièrement fruité et joliment boisé. Cet assemblage de 70% de cabernet sauvignon et de 30% de merlot arbore une bouche fruitée et légèrement épicée.
Les tannins sont bien fondus et la longueur en bouche est très belle. Pouvant se conserver une bonne dizaine d’années, ce Pessac Léognan rouge s’accommodera à la perfection avec une viande grillée, des fromages à pâte persillée ou un fondant au chocolat.
Cuvée Tradition 2020
La robe de ce millésime 2020 est plus violette que celle du millésime 2022. Le nez de ce Pessac Léognan rouge très bien réussi est plus complexe, des notes de chocolat venant en contrepoint des arômes de fruits rouges. La bouche également plus complexe est plus astringente et plus boisée, mais le cassis explose littéralement.
Dotés de tanins très bien fondus, cette cuvée Tradition 2020 comporte une très belle longueur en bouche. Possédant identiquement une belle garde, ce Pessac Léognan rouge 2020 se mariera parfaitement avec des viandes grillées, des viandes en sauce ou des desserts au chocolat.
Cuvée Tradition 2019
La robe de cette cuvée Tradition 2019 est plus sombre que celle du millésime 2020. Le nez encore plus complexe de ce Pessac Léognan rouge offre des notes de fruits rouges compotés, de café et de chocolat. La bouche de ce Pessac-Léognan rouge plus complexe que celle du millésime 2020 est fruitée, ample, ronde, boisée et parfaitement équilibrée.
Ce premier millésime du Domaine de Mauriet est déjà une très belle réussite. Ce Pessac Léognan rouge pourra se déguster pendant une bonne dizaine d’années et se déclinera autour des mêmes accord mets vin que le millésime 2019.
